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Ken Loach
Lady Bird
Acteurs:
Crissy Rock
Vladimir Vega
Ray Winston
Sandie Lavelle
1994
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Maggy, comme tant d’autres gens, chante au karaoké du pub pour se sentir mieux, partager un peu de chaleur et trouver l’oubli. Elle y rencontre Jorje, un uruguayen clandestin qui a fui son pays. Ils font connaissance: Maggy a 4 enfants de 4 pères différents, tous violents, comme l’avait été son père ; Maggy n’a jamais rien connu d’autre que les rapports de violence. Un soir, elle avait laissé ses enfants pour aller chanter au pub, mais l’électricité de son logement n’était pas aux normes et un incendie s’est déclaré. Sean, son fils aîné a été gravement brûlé. La Dass place les enfants de Maggy dans des familles d’accueil.
Jorge a trouvé un travail mais, comme il est sans papiers, il est payé moitié moins cher .
Maggy et Jorge nouent une relation, ils trouvent un appart, et s’installent ensemble. Maggy est enceinte, mais quelques jours après la naissance du bébé, les services sociaux et la police viennent prendre l’enfant pour le placer dans un foyer. Le jour du jugement, non seulement le bébé sera adopté mais Jorge risque d’être expulsé du pays. Maggy et Jorge sont victimes des accusations du voisinage, des services sociaux, de la police, et lorsque Maggy est de nouveau enceinte, la Dass et la police viennent prendre le bébé à la maternité quelques heures après sa naissance.
Jorge tente comme il peut de soutenir Maggy avec calme et amour.
Un cycle infernal de violences à répétitions constitue la trame de la vie de Maggy qui n’est pas en mesure de lutter contre cet engrenage et ne sait se défendre qu’en se montrant elle aussi violente. Ses réactions servent aux juges, à la Dass et à la police à démontrer qu’elle est incapable d’éduquer des enfants dans un climat serein, tout s’acharne contre elle et ses réactions ne font qu’empirer la situation. Jorge a connu des horreurs au Paraguay et semble au bord du désespoir dans cette nouvelle vie, qui écrase les faibles comme un rouleau compresseur, indéfiniment.
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Ken Loach
Land & Freedom
Acteurs:
Ian Hart
Rosana Pastor
Iciar Bollain
Tom Gilroy
Marc Martinez
1996
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David, jeune communiste anglais rejoint les troupes espagnoles dans leur lutte contre le fascisme. Avec peu de moyen mais une détermination farouche, les combattants avancent contre l’ennemi malgré les pertes qu’ils subissent. La guerre nécessite des moyens dont l’armée populaire ne dispose pas : il faut nourrir les troupes et trouver des armes. Deux questions lourdes de sens vont faire échouer leur mouvement autonome anarchiste. Tout d’abord, le partage des terres, c’est à dire la collectivisation. Cette question se heurte à l’opposition des petits propriétaires qui n’envisagent pas de céder leur propriété. Le fait de les forcer transforme des « sympathisants » du mouvement en ennemis qui se tournent vers les franquistes. Puis, le problème des armes finira par diviser les partisans. La révolution populaire anarchiste à court de moyens devient une double cible : à la fois pour les fascistes de par sa vulnérabilité, et pour les mouvements politiques organisés. David quitte les milices populaires pour rejoindre les communistes, mais il comprend vite que ses anciens frères d’armes sont pris pour cible par ceux qu’il vient de rejoindre Les troupes soviétiques ont besoin de reconnaissance et veulent récupérer le mouvement. Une propagande discréditant les milices populaires jette le trouble entre les opposants au fascisme qui finissent par s’entretuer. Perdant les idéaux auxquels il avait cru en adhérant au parti communiste, il rejoint de nouveau les milices anarchistes et reprend le combat à leurs côtés.
Quelque soit l’organisation politique, le pouvoir nécessite une reconnaissance, et peu importent les méthodes ou l’ampleur du mensonge, ou encore le nombre de victimes, les grands mouvements politiques ne cherchent qu’à acquérir plus de pouvoir et plus de territoire. Les mouvements populaires anarchistes sont écrasés pour les besoins de « la cause ».
L’histoire de la guerre d’Espagne est toujours très actuelle, en ce sens que les mouvements qui soutiennent le capitalisme ont pour point de convergence l’enrichissement au dépend des plus pauvres. Les mouvements qui tentent de lutter contre le capitalisme, ou du moins pour une justice plus équitable pour les plus démunis, se heurtent au milieu de la lutte à des conflits d’intérêts car une partie de ces mouvements est récupérée par un autre mouvement plus ambitieux et plus avide de pouvoir. Mais aussi, parce qu’au milieu de la bataille (même en cas de paix !) il est question de partage, et que personne ne veut lâcher d’un pouce le presque rien . C’est sans doute très cliché, très caricatural, néanmoins, il est toujours plus difficile pour ceux qui ont peu (et chèrement acquis) de partager ce peu pour peut-être obtenir plus un jour, que de miser plus gros sur des paris certains pour ceux qui détiennent les trois quarts des richesses, car il n’y a rien à partager, il n’y a qu’à gagner.
Depuis 1936, le terrain de jeu du capitalisme s’est largement étendu et il est bien plus difficile de lutter sur un si vaste territoire….Est-ce qu’aujourd’hui il ne reste que la misère à partager ? Est-ce qu’aujourd’hui les gens sont encore capables d’espérer autre chose, ou sont ils seulement prêts à capitaliser leur bien en pillant ceux qui ont encore moins ? Sont-ils prêts à unir leurs forces et à ne pas se laisser manipuler et ingurgiter par des organisations politiques bien assises qui ne font que jouer au monopoly sur la planète ?
Comme l’Histoire ne parvient pas à servir de leçon….je crains le pire.
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Ken Loach
Sweet Sixteen
Acteurs:
Martin Compston
William Ruan
Annmarie Fulton
Michelle Coulter
Gary McCormack
Tommy McKee
2002
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Liam va avoir 16 ans, sa mère est en prison, son père n’existe pas, Stan,le mec de sa mère est un dealer qui fait affaire avec le grand père. La sœur de Liam tente de suivre un autre chemin, elle veut couper les ponts avec sa mère en qui elle n’a pas confiance.
Liam a quitté l’école et vit de petites combines avec son ami Pinball jusqu’au jour où il vole la came de Stan. Mais, en dealant, il met le doigt dans un engrenage et commence à dealer pour un gros poisson. Son nouveau boss exclut Pinball qui décide de se venger. Ni Liam ni Pinball n’ont à perdre quoi que ce soit, il n’ont peur de rien, ou du moins sont totalement inconscients des risques qu’ils prennent. Mais Liam est persuadé que sa mère ne suivra plus la mauvaise pente s’il la prend en charge, et ses illusions tombent les unes après les autres. Lorsque sa mère sort de prison, il est convaincu que leur nouvelle vie dans l’appartement que son boss lui a fourni va définitivement tout changer, et qu’enfin Liam, sa mère, sa sœur et son petit garçon formeront une famille unie. Lorsque Liam découvre que sa mère est retournée chez son ex, il ne peut pas se résoudre à l’idée qu’elle a réellement fait ce choix, il accuse sa sœur de l’y avoir poussé. Mais, la vérité lui faisant face, il est submergé par le désespoir, il n’ plus aucune illusion sur sa mère, ni sur la vie. Il plante Stan avec un couteau, s’enfuit et est recherché par la police.
Une jeunesse laminée à la base dans cette Ecosse loin des châteaux. Aucun espoir ne ressort dans ce film, seulement des illusions qui s’effondrent sous le poids d’une réalité sociale terrifiante. Ce n’est même pas la misère du prolétariat, c’est encore moins que cela, aucune lutte n’est envisageable, aucun changement ne peut se profiler à l’horizon. |
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Ken Loach
Bread & Roses
Acteurs:
Pilar Padilla
Adrien Brody
Elpidia Carrillo
Jack McGee
Monica Rivas
Franck Davilla
2000
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Maya débarque à Los Angeles clandestinement pour retrouver sa sœur qui réussit à la faire engager dans la société de ménage où elle travaille. Ici encore, c’est un univers dur pour ces esclaves modernes. Leurs salaires sont inférieurs à ceux que d’autres employés de ménage touchaient 20 ans plus tôt, et le renvoi immédiat et sans appel ressemble à une loterie, au bon vouloir du manager. Ce dernier fait pression sur les employés pour favoriser la délation et leur interdire de se syndiquer. Beaucoup d’employés trouvent malgré tout que leur sort est meilleur que celui qu’ils avaient dans leur pays d’origine, et le peur de perdre leur travail et d’être expulsés. Mais Maya parvient à fédérer ses collègues grâce à l’intervention d’un délégué syndical. Ken Loach ne fait pas d’angélisme par rapport à l’organisation syndicale, dont un des leaders impose à son délégué de laisser tomber les employés de la société de ménage car les résultats se font trop attendre, il lui demande de trouver un autre combat à mener. Sam, le délégué l’envoie balader crânement en lui faisant remarquer que le parti démocrate peut attendre un peu pour récolter les fonds. Rien n’est certain quant à l’issue de cette lutte pour que les employés obtiennent une assurance sociale, des congés payés et la réintégration des employés qui ont été virés. Mais les employés tiennent bon, soutenus par d’autres travailleurs syndiqués. Du pain et des roses fut le slogan utilisé par les premiers grévistes ; de quoi vivre et aussi de la dignité, voilà ce qu’ils réclament. Dans le pays le plus riche du monde fleurit la plus grande misère et la machine à profit tourne à plein rendement. Pourtant, l’union des fourmis laborieuses pourrait porter ses fruits, mais, une fois de plus, chacun a peur, et chacun espère s’en sortir seul, passer par un petit espace, se faufiler sans rien dire, pour quelques dollars de plus ; chacun se dit aussi que personne ne l’a jamais aidé, pourquoi aider les autres ? C’est une sinistre et géniale manipulation des masses qui fait miroiter à chacun qu’une chance est possible, une chance, mais pas d’avantage… Alors c’est à qui pourra la saisir, quitte à vendre ses amis. Cette attitude est toutefois moins immorale que celle de ceux qui s’ingénient à la provoquer.
Le film se passe à Los Angeles, mais de semblables situations se passent en France et dans les autres pays européen, où les gens ont aussi absorbé une culture de l’individualisme, d’autant plus forte lorsqu’il s’agit du sort de personnes étrangères. Petite cruauté humaine, lorsque celui qui est considéré comme un sous homme peut trouver l’existence de personnes encore moins considérées que lui, cela lui apporte enfin une dimension de grandeur dans toute sa relativité.
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Ken Loach
"Le vent se lève"
"the wind that shakes the barley"
Acteurs :
Cillian Murphy
Pádraic Delanay
Liam Cunningham
Orla Fitzgerald
Mary Riordan
Mary Murphy
Laurence Barry
2006
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1- Commentaires de Ken Loach
L’histoire se situe en 1920, à cette époque, en Irlande, les rassemblements étaient interdits. Le jeu du hurling pratiqué par les Irlandais, peut être considéré comme fédérateur à la fois du maintien de l’identité nationale et culturelle, mais également comme un moyen de rassembler des partisans de l’indépendance. C’est au sein des équipes que l’armée républicaine recrutait ses soldats. La révolte des irlandais a débuté à la suite des révolutions Française et Américaine, sous l’impulsion de Wolfe Tone en 1798. Cette lutte a duré plusieurs siècles. La balade « the wind that shake the barley » date du 19ème siècle lorsque les Irlandais tentaient d’instaurer leur indépendance.
Les dockers et les cheminots ont joué un rôle crucial dans la lutte républicaine par leurs forts mouvements de grève ; ces blocus ont obligé les Anglais à se déplacer sur les routes et à tomber dans des embuscades. A cette époque 2000 conducteurs de trains ont été licenciés. Les femmes ont également joué un rôle essentiel, notamment en tant que messagères, en tant qu’informatrices pour celles qui travaillaient dans l’administration. Leur organisation politique était le Cunmann na mBan.
Les volontaires engagés dans la lutte armée prêtent serment au gouvernement de 1919 formé suite à la victoire du Sinn Féin aux élections de 1918, ce gouvernement avait déclaré l’indépendance de l’Irlande, en prêtant serment à ce gouvernement, les volontaires deviennent des soldats de l’Armée Républicaine Irlandaise. Cette élection démocratique a été ignorée par le gouvernement britannique.
Le conflit a été en partie considéré comme une guerre de religion, l ‘état Britannique était protestant et sectaire, les Irlandais, catholiques, c’est de là qu’est né l’aspect religieux du conflit, le catholicisme est devenu un symbole identitaire. Quand l’espace politique est réduit, la religion prend le dessus et finit par être politisée.
Les rebelles sont obligés de fuir leurs habitations, à cause des représailles des black and tan, ils forment alors des colonnes volantes qui se regroupent pour exécuter leur mission puis se dispersent. Les méthodes utilisées par les militaires Anglais, et notamment les tortures ont été niées par une partie de la presse Anglaise lors de la sortie du film, une forme de négationnisme…
Les volontaires se réfugiaient dans des familles qui leur offraient l’hospitalité. Pour ces familles, cet acte était un investissement important, non seulement à cause du danger mais également du fait qu’elles nourrissaient les rebelles, à cette époque, la nourriture était rare, beaucoup d’enfants mourraient de malnutrition.
Cette organisation de guérilla a permis aussi de rendre le pays difficile à gouverner pour les Anglais. Les Irlandais commençaient à le gouverner eux-mêmes en mettant en place des tribunaux (souvent dirigés par les femmes du Cunmann na mBan) et une sorte de contre-pouvoir afin de donner confiance au peuple dans son autonomie.
Les scènes du film montant des maisons incendiées sont un reflet exact, cette pratique était très courante, le centre ville de Cork avait été complètement détruit par les incendies ; les cibles étaient les villages, les villes, les laiteries, les locaux des syndicats…
Après l’incendie de sa maison, une vielle femme refuse de partir habiter ailleurs, elle doit avoir un peu plus de 70 ans et a vécu l’époque de la guerre agraire (1870 – 1880). A cette époque de la famine, les familles étaient expulsées, déplacées, chassées de leurs maisons.
L’opinion publique en Angleterre et en Amérique a contraint le gouvernement Britannique à mettre fin à la guerre. Cette trêve arrivait à point car l’IRA était dans une impasse, manquait d’armes et de munitions, les pertes devenaient si lourdes qu’elles affectaient toute la communauté. Cette trêve a duré 6 mois, les gens espéraient réellement leur indépendance lorsqu’ils ont appris la ratification du traité. Il a été signé en Angleterre sans demander l’avis des leaders de l’IRA. Les britanniques ont choisi avec précision les termes de ce traité afin de rendre possible leurs objectifs à long terme. Le traité a été présenté comme un ultimatum aux signataires, Mickael Collins et les autres ont signé sous la menace d’une guerre. Churchill s’est montré particulièrement impitoyable et exigent par rapport à ce traité, dans sa volonté à préserver ce que les Britanniques considéraient comme leur propre intérêt.
Dans un conflit qui durait depuis des siècles, c’était la première fois que les Irlandais amenaient les Anglais à négocier , et ils pensaient que la lutte aurait été vaine pour n’obtenir qu’un pis aller au lieu d’une réelle indépendance, alors que la lutte était encore possible en poursuivant les efforts. S’ils renonçaient à ce moment là, ils leur faudrait renoncer à jamais. Accepter cette demi mesure signifiait également que la mort des camarades de lute aurait été vaine. La 1ère organisation politique qui a refusé le traité a été le Cunmann na mBan.
La Grande Bretagne possédait à cette époque un empire colossal, et lâcher un pouce de terrain à l’Irlande aurait fait boule de neige dans les autres colonies, qui, auraient pu elles aussi revendiquer leur indépendance (Inde, Afrique).
L’Irlande du Nord restait une colonie, le nouvel état libre avait juré loyauté à la couronne britannique. Mais en Irlande du Nord, à cette époque ,il y avait des pogroms à Belfast. L’organisation des mouvements politique de soutien à l’empire doit être évoqué : Edward Carson (loyaliste) avait fondé en 1913 l’UVF (force des volontaires de l’Ulster), une sorte de milice à la solde de la couronne ; ce mouvement était soutenu financièrement par des Tories (conservateurs anglais) et par de puissants industriels. Ces financements ont provoqué la montée en charge de la militarisation en Irlande. En réponse à cela, se sont créés les mouvements des volontaires républicains Irlandais. Les Irlandais soutenaient le programme social du 1er Dail – fondateur de la république – qui s’inspirait de la mouvance républicaine de James Connolly : une société fondée sur des relations plus justes entre les riches et les pauvres, où la terre serait collectivisée. Mais cet idéal s’’est vu peu à peu évincé et devait être repoussé jusqu’au départ des Anglais…Les travailleurs ont continué d’attendre…
Le traité avait été habilement lancé pour continuer à maîtriser l’Irlande, mais également pour semer la discorde entre les sections du mouvement républicain. Pour la population, il était très difficile de prendre parti pour l’un ou l’autre camp. Le traité avait été signé le 6 décembre, au moment de noël, la population a été influencée par la presse, les églises, le pouvoir, les leaders de la communauté et leurs familles ; les gens étaient usés par la guerre, et ont changé d’avis après avoir d’abord rejeté le traité, ils ont fini par l’accepter et baisser les bras : « puisque Mickaël Collins s’en contente, nous aussi ». Mais le traité ne prenait pas en compte les graves problèmes sociaux présents à cette époque (extrême pauvreté, malnutrition etc…) Les opposants au traité tentaient d’informer la population par la distribution de tracts reprenant les termes de Liam Mellows (écrits en prison). Ce leader républicain défendait la nécessité pour les résistants d’avoir un programme social qui donne du sens à leur cause.
La guerre civile a débuté au palais de justice où les chefs anti-traité s’étaient retranchés depuis avril et avaient installé leur QG, l’attaque a eu lieu en Juin 1922.
Beaucoup de républicains ont baissé les bras à ce moment là, car il leur était inconcevable de retourner leurs armes contre leurs anciens camarades ; ce que le gouvernement britannique avait prévu. Les combattants anti-traité ont du, pour poursuivre la lutte, recommencer ce qu’ils avaient fait : attaquer les casernes pour récupérer des armes. Le gouvernement britannique avait envoyé des armes aux chefs du gouvernement du nouvel état libre, et, leur avaient intimé l’ordre d’écraser le mouvement rebelle, faute de quoi, les Anglais reviendraient occuper le pays et se chargeraient de rétablir l’ordre. Comme Mickaël Collins, nombreux étaient ceux qui pensaient qu’une fois installé, le gouvernement de l’Etat libre pourrait rejeter le traité.
Les chefs de l’état libre agissaient pieds et poings liés sous la menace, et devait assumer la responsabilité de défaire le mouvement anti-traité. Les méthodes utilisées par l’état libre furent les mêmes que celles des militaires Anglais, ils réglèrent le problème en assassinant les partisans de la totale indépendance (dont Liam Mellows), agissant ainsi sous la menace « afin d’éviter le pire ».
L’église, la presse et l’establishment soutenaient le traité en invoquant la paix, mais le traité préservait également les relations de pouvoir préexistantes au sein de l’Etat ; il n’y avait plus aucune chance que soit mis en place le programme social. L’Eglise en soutenant le traité renforçait ses positions politiques. Des milliers de gens ont du émigrer à cette époque, faut de trouver un travail dans l’Etat libre.
La réplique de Damien à son frère dans le film : « tu as endossé le tablier du boucher » est une référence à James Connolly qui comparait le drapeau de l’Union Jack au tablier du boucher pour illustrer les méthodes sanglantes utilisées par l’empire dans l’ensemble de ses colonies.
Il est difficile d’envisager une paix durable encore aujourd’hui, tant que ce traité existe.
2- Mes commentaires Les méthodes utilisées par les militaires Anglais (Black & Tan) sont les mêmes que celles des nazis, aucune différence. Les Irlandais, colonisés par les Britanniques depuis plusieurs siècles, sont, dans l’ensemble, résignés ; et, sporadiquement mènent des actes de « rébellion » , ils partagent un désir profond et partagé de libérer leur pays pour faire place à leur propre gouvernement, le Dail Eireann.
On peut comparer ce mouvement à celui des résistants en France pendant la seconde guerre mondiale. Les syndicats ouvriers ont joué un rôle important, comme les cheminots; d'ailleurs, un des perosnnages principaux est un cheminot. Lorsqu'il est en prison avec Damien, ils récitent ensemble les paroles d'un discours de Connolly, et le cheminot, récite ^les vers d'un poëme, et souligne qu'il est ouvrier mais que cela ne signifie pas qu'il est inculte. Les soldats Anglais ne s’attendent pas à ce qu’un mouvement de résistance s ‘organise, l’occupation dure depuis trop longtemps et ils considèrent les Irlandais comme des attardés profonds, une race de sous-humains. (ce trait est caractéristique de toutes les puissances coloniales) Les Irlandais ne sont ni formés, ni équipés, ni organisés pour lutter contre une armée aussi aguerrie que celle de l’empire britannique. Lorsqu’ils commencent à s’organiser, les troupes anglaises ripostent aux attaques en dirigeant leurs tirs sur les civils, aveuglément.
Les riches propriétaires – souvent de vieilles familles anglo-irlandaises – contribuent à maintenir la population sous le joug de l’empire favorable à leur prospérité, et disposent de moyens de pression efficaces pour obtenir des renseignements quant aux activités des rebelles.
Les volontaires qui s’engagent dans la lutte armée sont fidèles au Dail, mais dès que le gouvernement commence à s’organiser, notamment par la création de tribunaux, on retrouve un problème commun à toutes ces luttes : celui de la ligne de conduite à tenir entre une organisation régie par des principes et la réalité du terrain qu’est la nécessité des besoins matériels. Cette question donne lieu à des positionnements qui génèrent des scissions au sein du mouvement. Lorsque les Irlandais apprennent la trêve, ils sont au bord de l’asphyxie : manque de moyens et lourdes pertes humaines. Le traité signé en Angleterre n’est qu’une laisse un peu plus longue fixée au collier étrangleur, et ne constitue en rien un avancement, au contraire, ce traité a été rédigé de façon à maintenir l’Irlande sous le joug de l’Angleterre, et d’affaiblir le pays en le divisant. D’une part en annexant l’Irlande du Nord et d’autre part en provoquant une réelle séparation des Républicains : ceux qui espèrent connaître la paix – quel qu’en soit le prix- et ceux qui considèrent que des siècles de lutte, la perte des combattants, le respect du gouvernement élu pour une totale indépendance ne peuvent pas se traduire par cette mesure inacceptable, qui obligent les Irlandais à jurer fidélité au roi Britannique. A ce moment là, les républicains ne disposent en tout et pour tout que de 3500 fusils. Lorsque l’armée britannique quitte l’Irlande (pour remonter en Ulster), les nationalistes (pro-traité) gouvernent le pays. Mais, le gouvernement britannique les obligent à écraser le mouvement des anti-traité sous la menace de leur retour . L’illustration de cette histoire par les prises de position opposées des deux frères est tout à fait le reflet du climat de ce conflit, qui, à l’échelle de l’Irlande a été un conflit fratricide orchestré par l’empire britannique.
Le poids de l’église, en tant qu’institution, est très important également dans ce conflit, et les positions défendues par l’église sont en faveur des propriétaires, le message du prêtre illustre également ce discours insidieux qui fait douter les petits propriétaires en leur inspirant la peur du « rouge » qui veut « lui voler ses économies », l’excommunication prononcée à l’encontre des partisans anti-traité peut sembler anodine aujourd’hui, mais à cette époque, c’était un acte fort d’exclusion de la communauté, d’autant plus que les gens étaient profondément croyants.
En France, dans les années 70 à 90, les médias qui parlaient du conflit en Irlande ne s’étendaient surtout pas sur les raisons de cette lutte, et, les soldats de l’IRA n’étaient jamais présentés comme des soldats, mais comme des terroristes. Un groupuscule sanguinaire, qui frappait ici et là avec des méthodes barbares. La manipulation était efficace ! D’autant plus que la France et l’Angleterre – bien qu’animées de sentiments contradictoires depuis des siècles l’une envers l’autre – étaient alliées lors des deux dernières guerres et engagées respectivement dans un processus d’économie et de politique.
L’Irlande n’a jamais publiquement été reconnue comme une nation à part entière légitimée dans sa volonté de se battre pour son indépendance face à un empire colonial (à l’exception de la presse « rouge » - je ne dis pas « de gauche » volontairement car la « gauche » semble s’être affadie…) La France a observé la même attitude avec ses colonies, elle a donc regardé d’un œil très distrait les événements Irlandais. Je me souviens très bien que les médias parlaient d’une guerre de religion, c’es ainsi que l’on présentait les choses. Pourtant, il ne viendrait pas à l'idée de présenter aujourd'hui les résistants (les maquisards) comme des terroristes - je dis aujourd'hui parc qu'à l'époque ça c'est fait!
Tout cela n'est qu'une question de puissance, de partage de territoire et d'horreurs au quotidien . J'ai la désagréable impression que sans ce film de Ken Loach qui a fait parler d elui en se voyant attribuer la palme d'or à Cannes en 2006, la majorité des français continueraient de regarder l'Histoire avec cet oeil discret, presque aveugle... Mais je reste lucide, cela reste abstrait et lointain pour la plupart des gens.
A propos de la Bande Originale du film : La chanson « Óró Se Do Bheatha’Bhaile » composée par Patrick Pearse (un des leader de l’insurrection de Pâques 1916) a été reprise par Sinead O’Connor. La chanson « The Wind that Shakes the Barley » est un poème écrit au 19ème sicècle . La musique du film est composée par George Fenton.
Quelques ouvrages pour approfondir le sujet :
Ernie O’Malley : The Singing Flame
Tom Barry: Guerrilla days in Ireland
C. Desmond Greaves: Liam Mellows and the Irish Revolution
Meda Ryan: The Real Chief (on Tom Bary)
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